Escapade vers un futur incertain
Les pertes du Bomber Command dans le département de la Marne
 

 
 

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Fairey Battle Mk. I, JNJN-(?), S/n K9283
No. 150 Squadron
détruit des suites d'un combat le 30 septembre 1939
à Ecury-sur-Coole, Marne (51), France
 
- Tant qu'une personne se souvient de toi, tu ne meurs jamais -

 

 

Un prétexte des plus fallacieux ayant conduit les armées allemandes à envahir la Pologne dès les premières heures du vendredi 1er septembre 1939, les gouvernements britannique et français, alliés de la nation polonaise, ont enjoint à Berlin de retirer ses troupes du territoire de leur allié commun, au plus tard pour le dimanche 3 septembre 1939. Faute d'avoir obtenu satisfaction, ce 3 septembre voit successivement le Royaume-Uni de Grande-Bretagne11 heures) puis la France17 h 30), entrer en guerre avec l'Allemagne.

Le soir même, le Bomber Command de la Royal Air Force accompli sa première opération nocturne de la Seconde guerre mondiale, en envoyant 10 des siens larguer des tracts au-dessus de quelques unes des villes de la Ruhr ou du Nord de l'Allemagne dans le cadre d'opérations baptisées Nickel. Missions qui vont perdurer jusque dans la nuit du 23 au 24 décembre 1939.

Toutefois, sans attendre la réponse à son ultimatum, la Grande-Bretagne, en vertu d'un accord de coopération militaire passé avec la France, transfère sur notre sol dès le samedi 2 septembre, lendemain de l'invasion de la Pologne, un dispositif aérien à deux composantes.

La première, l'Air Component, voit son emploi dépendre directement du commandement de la British Expeditionary Force (BEF) ou, en français, Corps Expéditionnaire Britannique (CEB) qui est chargé de prendre part aux combats terrestres aux côtés des troupes françaises. L'Air Component, constitué de divers Squadron de chasse, de reconnaissance et de liaison, a pour objet d'accompagner et d'éclairer la progression du BEF, tout en assurant sa protection aérienne.

Quant à la seconde de ces deux composantes, baptisée Advanced Air Striking Force (AASF), ou force de frappe aérienne avancée, elle est exclusivement constituée de bombardiers légers, dont une majorité sont du type Fairey Battle, un monomoteur monoplan triplace à la ligne si caractéristique, complétée de quelques Squadron de Bristol Blenheim, autre monoplan triplace mais bimoteur celui-là. Apte au bombardement tout autant qu'à la reconnaissance, cet ensemble, indépendant, est placé sous les ordres de l'Air-Vice Marshall Playfair avec pour mission d'assurer le bombardement tactique, c'est à dire intervenir directement sur le champ de bataille ou ses abords immédiats.

Toutefois, la constitution puis l'envoi en France de l'AASF ont eu pour répercussion au sein du Bomber Command, la dissolution de son No. 1 Group duquel dépendait initialement la totalité des Squadron de Battle et de Blenheim désormais rattaché à l'AASF.

C'est ainsi que le samedi 2 septembre 1939, plusieurs Squadron de la RAF viennent en France pour y prendre leurs quartiers. Parmi les unités concernées par ce mouvement, se trouve le No. 150 Squadron dont les Fairey Battle Mk I sont, dans un premier temps, basés sur le terrain de Challerange dans le département des Ardennes. Il n'y séjournera toutefois qu'un court laps de temps puisqu'à compter du lundi 11 septembre suivant, l'unité rejoint le terrain d'Ecury-sur-Coole, dans le département de la Marne.

Trouvant son origine dans la Première guerre mondiale, le No. 150 Sqn. nait le 1er avril 1918 à Salonique, en Macédoine, en tant que Squadron de chasse. C'est donc au dessus du front oriental de Macédoine et de Turquie qu'il opère jusqu'à sa dissolution qui intervient en 1919. Réactivé le 8 août 1938 sur le terrain anglais de Boscombe Down, il se voit attribuer à cette occasion un nouveau rôle. Celui d'unité de bombardement. Pour ce faire, il perçoit en tant qu'avion d'arme le bombardier léger Fairey Battle avec lequel il entre de plein pied dans le conflit.

Dans les jours qui suivent la déclaration de guerre du dimanche 3 septembre 1939, chacune des parties en présence s'attend au déclenchement imminent des hostilités. Aussi, une tension extrême s'installe-t-elle sur tous les terrains de France. Les appareils sont armés, pleins effectués. Les équipages, tout autant que le personnel au sol, sont sur le qui-vive. Mais en l'absence de toute confrontation directe entre les combattants, la pression se relâche petit à petit avant de laisser place à cette période si troublante que l'Histoire va retenir sous les différents vocables de Sitzkrieg (la guerre assise) pour les allemands ; de Phoney War (la guerre truquée) pour les britanniques et de Drôle de guerre chez les français.

Un terme pour le moins inapproprié lorsque l'on sait que les aviateurs des deux bords, loin de rester inactifs, participeront pleinement aux opérations de l'époque qui présenteront pour eux, tous les aspects d'un véritable conflit armé, sans aucun trucage et bien loin de tout comique de situation !

En effet, au No. 150 Squadron, de même que dans toutes les unités aériennes alliées, la vie est désormais quotidiennement rythmée, lorsque les conditions atmosphériques le permettent, par diverses activitées telles que les vols d'entraînements, les exercices de tirs et de bombardements aériens, visant à parfaire l'instruction des équipages, leur maîtrise des appareils ou leur connaissance de la topographie des secteurs survolés, mais également de reconnaissances lointaines au-dessus des lignes ennemies.

C'est d'ailleurs dans le cadre d'un exercice d'entraînement photographique que le mercredi 20 Septembre 1939, le No. 150 Sqn. devra déplorer ses premières pertes en vies humaines. Ce dramatique accident ne remet toutefois pas en cause l'activité aérienne du Squadron et les vols se poursuivent.
[ à ce propos, le lecteur pourra se reporter à l'historique du Battle L5225 ]

Dix jours après ce premier drame, le samedi 30 Septembre 1939, le No. 150 Sqn. participe cette fois à une expédition devant le mener au-desus du territoire ennemi. Ce jour là, six Fairey Battle Mk I décollent de leur terrain d'Ecury-sur-Coole entre 10 h 55 et 11 h 00 (heure anglaise). La formation britannique est chargée d'opérer des reconnaissances aériennes de l'autre côté de la frontière allemande, au-dessus de la région de la Sarre.

Victime de problèmes mécaniques, l'un des Battle est cependant contraint de faire demi-tour, abandonnant ainsi la mission qui lui a été impartie. Sans le savoir, son équipage vient ainsi d'échapper à un funeste destin. Poursuivant leur vol, les cinq autres appareils parviennent sur le secteur d'opération qui leur a été assigné. Là, ils sont tout d'abord pris à partie par la Flak sans que pour autant cette dernière ne parviennent à leur causer le moindre dégât.

Malheureusement, peu avant 12 h 00, huit chasseurs Messerschmitt Bf. 109E appartenant à la 2./JG 53 surgissent à leur tour dans cette même portion de ciel. Ceux-ci ne manquent pas l'occasion d'engager les bombardiers britanniques qui, quant à eux, ne tardent pas à faire la preuve de leur terrible vulnérabilité au combat. L'affrontement est bref mais son issu est fatale à quatre des cinq Battle. Les K9387, K9484, N2028, N2093 sont en effet abattus. Des 12 membres d'équipages présents à bord, 5 trouvent la mort, un est capturé tandis que les 6 derniers ont la chance de tomber dans leurs lignes...

Ces victoires sont revendiquées par l'Oberleutnant Rolf Pieter Pingel (succès crédité à 11 h 50) qui est déjà titulaire de 5 victoires remportées lors de la guerre d'Espagne, par les Unteroffizier Franz Kaiser (11 h 57) et Hans Kornatz (12 h 05) ainsi que par le Staffelfeldwebel Ignaz Prestele (11 h 53).

Toutefois, plus heureux que ses compagnons d'infortune, le pilote du Battle K9283, le Squadron Leader W. L. M. MacDonald, parvient à fausser compagnie à ses assaillants, non sans que son mitrailleur, l'Aircraftman 1st Class A. Murcar, n'ait au préalable abattu l'un de ses opposants. Dans les faits, il ressort que le Stfw Prestele est effectivement contraint de rompre le combat, son Me 109 ayant été endommagé.

Pourtant, le calvaire de l'équipage du Battle K9283 est loin d'être terminé. Après avoir été pris en chasse au-dessus des lignes françaises par l'Unteroffizier Josef Wurmheller et avoir durement encaissé (une source fait état d'une quarantaine d'impacts comptabilisés) au point que la Luftwaffe ira même jusqu'à homologuer la destruction de ce Battle à l'Utfz. Wurmheller (revendiqué comme ayant été abattu à 12 h 10), c'est avec deux blessés à bord, le Sgt F. H. Gardiner, observateur et l'AC1 Murcar, qu'à 13 h 15, le S/L MacDonald n'écrase son appareil d'avantage qu'il ne le pose sur la piste d'Ecury-sur-Coole. Victime d'un pneu crevé, le Battle commence par y faire un tour complet sur lui même avant de prendre feu et d'achever ainsi sa carrière.

A la suite de ce vol, le Sgt Gardiner se voit décerner la British Empire Medal par le roi d'Angleterre George VI, lors d'une cérémonie se déroulant sur le terrain de Pilvot le 8 Décembre 1940. De leur côté, le S/L MacDonald et l'AC1 Murcar devront attendre le mois de février 1940 avant de se voir respectivement remettre la Distinguished Flying Cross (réservée aux seuls officiers) et la Distinguished Flying Medal (réservée pour sa part aux sous-officiers).

Néanmoins, la destruction de ces 5 Battle ne restent pas sans conséquence immédiate. D'autant qu'elles s'ajoutent à d'autres pertes survenues précédemment dans des circonstances identiques. Aussi, au niveau de l'état-major de l'AASF on s'alarme et l'on prend conscience de l'extrême vulnérabilité du Fairey Battle lorsqu'il a à se mesurer aux chasseurs allemands. Alors que la doctrine d'emploi de ces bombardiers prévoit que ceux-ci soit à même de se défendre seul sans aucune escorte de chasse, les faits démontrent qu'il n'en est rien. En conséquence, tirant immédiatement les conclusions de ces désastres, les responsables britanniques prennent la décision qui s'impose. Les Battle sont relevés des missions de reconnaissance sur l'Allemagne qui incombent désormais aux unités équipés de Blenheim

Pour quelques mois encore, le Fairey Battle va donc continuer à faire illusion dans son rôle de bombardier. Mais à compter du 10 mai 1940, sous la pression dramatique des événements, les états-majors seront contraint de faire "flèche de tout bois" pour tenter d'enrayer la progression allemande. Et les équipages de Battle se verront à nouveau lancé dans la bataille, bien souvent sans aucune escorte de chasse digne de ce nom, ce qui ne manquera pas de causer de terribles pertes dans leurs rangs.

 
   
 
 
Sources principales :
 
Bomber Command Losses, Vol.1 (1939-1940), W. R. CHORLEY ;
Combats Aériens sur la Meuse & la Semoy, F. & P. ROGER.

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