Un
prétexte des plus fallacieux
ayant conduit les armées
allemandes à envahir
la Pologne
dès les premières
heures du vendredi 1er
septembre 1939, les gouvernements
britannique et français,
alliés de la nation polonaise,
ont enjoint à Berlin
de retirer ses troupes du territoire
de leur allié commun,
au plus tard pour le dimanche
3 septembre
1939. Faute d'avoir obtenu
satisfaction, ce 3
septembre voit successivement
le Royaume-Uni
de Grande-Bretagne (à
11 heures)
puis la France
(à 17
h 30), entrer en guerre
avec l'Allemagne.
Le
soir même, le Bomber
Command de la Royal
Air Force accompli sa
première opération nocturne
de la Seconde
guerre mondiale, en envoyant
10 des siens larguer des tracts
au-dessus de quelques unes des
villes de la Ruhr
ou du Nord
de l'Allemagne
dans le cadre d'opérations
baptisées Nickel.
Missions qui vont perdurer jusque
dans la nuit du 23
au 24
décembre 1939.
Toutefois,
sans attendre la réponse à son
ultimatum, la Grande-Bretagne,
en vertu d'un accord de coopération
militaire passé avec la France,
transfère sur notre sol
dès le samedi 2
septembre, lendemain
de l'invasion de la Pologne,
un dispositif aérien à deux
composantes.
La
première, l'Air
Component,
voit son emploi dépendre
directement du commandement
de la British
Expeditionary Force (BEF)
ou, en français, Corps
Expéditionnaire Britannique
(CEB)
qui est chargé de prendre part
aux combats terrestres aux côtés
des troupes françaises. L'Air
Component, constitué
de divers Squadron
de chasse, de reconnaissance
et de liaison, a pour objet
d'accompagner et d'éclairer
la progression du BEF,
tout en assurant sa protection
aérienne.
Quant
à la seconde de ces deux
composantes, baptisée
Advanced
Air Striking Force (AASF),
ou
force de frappe aérienne avancée,
elle est exclusivement constituée
de bombardiers légers,
dont une majorité sont du type
Fairey
Battle, un monomoteur
monoplan triplace à la ligne
si caractéristique, complétée
de quelques Squadron
de Bristol
Blenheim, autre
monoplan triplace mais bimoteur
celui-là. Apte au bombardement
tout autant qu'à la reconnaissance,
cet ensemble, indépendant,
est placé sous les ordres de
l'Air-Vice
Marshall Playfair
avec pour mission d'assurer
le bombardement tactique, c'est
à dire intervenir directement
sur le champ de bataille ou
ses abords immédiats.
Toutefois,
la constitution puis l'envoi
en France
de l'AASF
ont eu pour répercussion
au sein du Bomber
Command, la dissolution
de son No. 1
Group duquel dépendait
initialement la totalité des
Squadron
de Battle
et de Blenheim
désormais rattaché à
l'AASF.
C'est
ainsi que le samedi 2
septembre 1939, plusieurs
Squadron
de la RAF
viennent en France
pour y prendre leurs quartiers.
Parmi
les unités concernées par ce
mouvement, se trouve le No. 218
Gold Coast Squadron dont
les Fairey
Battle Mk I viennent
s'établir sur le terrain
d'Aubérive-sur-Suippes,
dans le département de
la Marne.
Constitué
le 24
avril 1918 à Douvres,
dans le Kent,
le No. 218
Sqn. est transféré
en France
environ un mois après
sa création. C'est
en tant qu'unité de bombardement
diurne qu'il rejoint alors le
No. 5 Group
et le secteur de Douvres-Dunkerque
relevant du Naval
Command. En cinq mois
d'opérations, le Squadron
participe à 117 raids menés
à l'encontre de cibles
ennemis implantées tant en Belgique
qu'en France,
larguant par là même 94 tonnes
de bombes et revendiquant la
destruction en combats aériens
de 38 appareils adverses. Ses
glorieux faits d'armes ne lui
évitent pourtant pas la dissolution
qui intervient en 1919.
Toutefois, l'unité est reformée
à Boscombe
Down en 1936
avant de se voir transférer
vers la France
au lendemain même de l'invasion
de la Pologne.
Dans
les jours qui suivent la déclaration
de guerre du dimanche 3
septembre 1939, chacune
des parties en présence
s'attend au déclenchement
imminent des hostilités.
Aussi, une tension
extrême s'installe-t-elle
sur tous les terrains de France.
Les appareils sont armés, pleins
effectués. Les équipages, tout
autant que le personnel au sol,
sont sur le qui-vive. Mais en
l'absence de toute confrontation
directe entre les combattants,
la pression se relâche
petit à petit avant de
laisser place à cette période
si troublante que l'Histoire
va retenir sous les différents
vocables de Sitzkrieg
(la guerre
assise) pour les allemands
; de Phoney
War (la
guerre truquée) pour
les britanniques et de Drôle
de guerre chez les français.
Un
terme pour le moins inapproprié
lorsque l'on sait que les aviateurs
des deux bords, loin de rester
inactifs, participeront pleinement
aux opérations de l'époque
qui présenteront pour eux, tous
les aspects d'un véritable conflit
armé, sans aucun trucage
et bien loin de tout comique
de situation !
En
effet, au Gold
Coast Squadron, de même
que dans toutes les unités aériennes
alliées, la vie est désormais
quotidiennement rythmée,
lorsque les conditions atmosphériques
le permettent, par diverses
activitées telles que
les vols d'entraînements, les
exercices de tirs et de bombardements
aériens, visant à parfaire l'instruction
des équipages, leur maîtrise
des appareils ou leur connaissance
de la topographie des secteurs
survolés, mais également de
reconnaissances lointaines au-dessus
des lignes ennemies.
C'est
dans cette optique qu'en ce
lundi 13
novembre 1939 s'inscrit
le vol du Battle
K9356. Se devant
de maintenir son potentiel offensif
opérationnel, le Gold
Coast Squadron voit l'un
de ses équipages se livrer à
un exercice de bombardement
en piqué. Cet équipage
est celui du Pilot
Officer Robert Thynne,
pilote ; du Sergeant
Richard Cecil Luscombe Pike,
observateur et de l'Aircraftman
1st Class Vivian William
Liddle Richardson.
Mais l'entraînement vire au
drame lorsque l'appareil percute
le sol sur le territoire de
la commune d'Aubérive-sur-Suippes,
provoquant le décès des trois
aviateurs du bord. Portés
en terre au cimetière d'Epernay,
ils sont par la suite exhumés
avant d'être inhumés en la nécropole
du Terlincthun
British Cemetery de Wimille,
dans le Pas-de-Calais.
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