Le
vendredi 1er
septembre 1939, l'Allemagne
envahit la Pologne.
Le dimanche 3
septembre suivant, répondant
à cette agression, la
Grande-Bretagne
et la France
déclare la guerre au
IIIe Reich.
Après une période
d'attente de plus de 8 mois,
l'Allemagne
qui a reconstitué ses
forces et ses réserves
se lance à l'assaut de
l'Ouest le vendredi 10
mai 1940.
Perçant à Sedan,
la Werhmacht
enferme en Belgique
le meilleur des troupes alliés
qui sont anéhanties.
Puis, reportant son action sur
le Sud, les troupes allemandes
déferlent sur la France
qui cesse officiellement le
combat le mardi 25
juin 1940.
Désormais,
la Grande-Bretagne
se retrouve à lutter
seule face au grand Reich
qui domine l'Europe
de l'Atlantique
à l'URSS.
Toutefois de ces pays occupés
vont bientôt se lever
des hommes et des femmes qui,
refusant l'occupation de leurs
nations, vont se regrouper et
constituer des mouvements de
Résistance.
Conscient de l'apport que représente
pour eux ces résistants,
les britanniques vont très
rapidement mettre en place le
SOE
(Special
Operation Executive),
un service chargé de
soutenir les résistans
par la fourniture d'armes, de
ravitaillement, d'instructeurs,
etc. Mais la nécessité
d'obtenir des renseignements
quant aux activités et
forces de l'adversaire vont
également amener les
Services Secrets de l'Empire
à introduire puis à
exfiltrer des agents sur le
continent.
Toutefois
la seule voie d'accès
à l'Europe
occupée reste alors la
voie aérienne. Aussi
les britanniques vont-ils créer
le Special
Duties, deux Squadron
chargés spécifiquement
d'opérer dans le plus
grand secret pour déposer
ou reprendre des agents derrière
les lignes ennemies et y larguer
des approvisionnements. Ce seront
les No. 138
et 161
Squadron.
Créé
le 1er
juin 1918, le No. 161
Squadron n'eut qu'une
existence éphémère
puisqu'il fut dissout le 4
juillet suivant ! Reconstitué
le dimanche 15
février 1942 sur
le terrain de Newmarket
à partir d'un noyau d'hommes
prélevé sur les
effectifs du No. 138
Squadron et de l'escadrille
du Roi, le No. 161
Sqn. va rejoindre le
No. 138
Sqn. dans ses missions
secrètes.
Chargés
de parachuter armes, ravitaillement
et agents aux différents
mouvements de Résistance
implantés en Europe
occupée mais également
d'en rapatrier certains éléments
(aviateurs abattus ou agents),
le Squadron
va mettre en oeuvre plusieurs
types d'appareils tels que les
Westland
Lysander, Douglas
Havoc et Lockheed
Hudson.
En
mars 1942,
l'unité s'installe à
Graveley
qu'elle quitte pour Tempsford
en avril
suivant. En novembre
1942, le No. 161
Sqn. perçoit ses
premiers Handley
Page Halifax,
un appareil bien plus adapté
aux opérations spéciales
de parachutage.
C'est
ainsi qu'à Tempsford,
base ultra-secrète de la RAF
qui héberge les appareils
du No. 161
Squadron, la nuit du
vendredi 4
au samedi 5
août 1944 voit-elle un
équipage de cette unité se préparer
à partir en mission. L'opération,
baptisée Bob
166, va consister à
parachuter divers containers
à destination de la Résistance
ainsi que trois agents français,
le Sous-lieutenant
Damas Joseph Bernard
alias Bernard Laumon
[ Note
du Webmaster :
également
orthographié Laumont
voir Lamond selon les
sources
] ; l'aviateur
Pierre Paul Henri Antoine
alias Pierre Lirand [
NdW
:
parfois
orthographié Litrand
] qui semble tout
deux être membres de l'Armée
de l'Air et l'agent
Joseph Wagner dit Joseph
Orlan [ NdW
:
le grade exacte et l'arme d'appartenance
me sont inconnus ].
L'équipage
anglo-néo-zélandais
chargé de mener cette
mission à bien, est constitué
de 7 hommes particulièrement
expérimenté.
Les
membres de la Royal
Air Force sont le pilote,
le Flight
Lieutenant Eduard Albert
Loos, un aviateur âgé
de 27 ans qui plus est décoré
d'une Distinguished
Flying Cross ; le mécanicien
navigant de 28 ans, le Sergeant
Basil Feather Stone Holland
; le bombardier de 22 ans, le
Flight
Sergeant David Gordon
Patterson ; le mitrailleur
supérieur, le Warrant
Officer J. H. Hill
ainsi que le mitrailleur arrière
de 36 ans, le Flying
Officer Robert Buchan
Hall.
Quant
aux représentants de
la Royal
New Zealand Air Force,
ce sont l'opérateur radio, le
Pilot
Officer Kenneth Frederick
Morgan qui totalise 479
heures de vol pour 45 sorties
et le navigateur, le Flying
Officer Ian Armstrong
Blaikie, titulaire d'une
Distinguished
Flying Medal obtenue
le 12
mars 1943 et qui a précédemment
effectué un tour complet d'opérations
au Moyen-Orient
au sein du No. 104
Sqn., ce qui lui vaut
de comptabiliser 757 heures
de vol et de participer là
à sa 76e mission !
Pour
l'occasion, la monture qui leur
a été confié
est le Handley
Page Halifax B.
Mk V (Serial
number LL248)
codé MAU,
qui est issu des chaînes d'assemblage
de l'usine Rootes
Securities de Speke.
A
22 h 15
(heure anglaise), le lourd quadrimoteur
s'élance dans les airs pour
la dernière fois de son
existence.
Selon
diverses sources locales, le
LL248/MAU,
transporte une importante charge
d'armes, de munitions et d'explosifs,
voir de vivres, ainsi qu'une
forte somme d'argent, ce que
confirme d'ailleurs M. Gilbert
Grandval, chef des FFI
de la région
C de l'époque [ NdW
:
la région C regroupe les départements
des Ardennes, de la Marne, de
la Meurthe-et-Moselle, de la
Meuse, de la Moselle, des Bas
et Haut-Rhin ainsi que des Vosges
].
"
Le premier
gros envoi du B.C.R.A. fut effectué
dans la nuit du 31 mai au 1er
juin sur le terrain Honolulu
dans la Marne. On m'avait annoncé
17 750 000 francs mais l'équipe
de réception ne me remit que
11 500 000 francs dont 6 000
000 pour la région C et 5 500
000 pour la région D. Jamais
on n'est parvenu à savoir ce
qu'il était advenu des 6 250
000 francs manquants. Il s'agissait
là du budget de juin. Quant
au budget de juillet, il ne
parvint pas. L'avion qui devait
effectuer un nouveau parachutage
sur le terrain Honolulu dans
la nuit du 4 au 5 août ne rentra
pas à sa base ".
En
effet, lorsque le Halifax
se présente, aux environs de
minuit, au-dessus des communes
de Courdemanges,
Huiron
et Glannes,
situées au Sud-ouest
de la ville de Vitry-le-François,
il semble que, pour une raison
inconnue, le balisage de la
zone de largage n'ait pas été
mis en place à moins que, des
airs, ce dernier ait été insuffisamment
visible.
Quoi
qu'il en soit, l'appareil se
met à cercler dans le ciel champenois,
sans doute avec l'espoir de
repérer un signal provenant
du sol.
Mal lui en prend toutefois car
le terrain de Saint-Dizier,
tout proche, héberge une unité
de la Nachtjagd,
la chasse de nuit allemande.
Peut-être est-ce donc
l'un de ses appareils qui intercepte
le LL248/MAU
?
"
Il était
minuit. Depuis les habitations
de Glannes, nous avons entendu
le craquement formidable des
canons de l'avion allemand
".
"
Le Halifax
suivait une direction Sud/Nord.
Il fut sans doute touché
à la verticale de Courdemanges,
sa cargaison pris feu et explosa
en vol, si bien que l'avion
passa en flammes au-dessus de
Huiron et de Glannes en perdant
de l'altitude pour s'écraser
à [
censuré
par le Webmaster
]
".
"
Plusieurs
personnes ont couru vers
[
censuré
par le Webmaster
] où
venait de s'écraser le Halifax.
Ce sont des gens de Glannes
qui ont sorti les corps de la
ferraille. Tous les occupants
étaient morts sur le coup et
leurs cadavres étaient disloqués.
Seul le pilote paraissait intact.
(...)
"
Les allemands
intervenus par la suite nous
ont fait circuler. Dieu merci,
car environ trente minutes après
l'écrasement de l'avion, un
chasseur non identifié a surgi
et a copieusement pilonné la
carcasse ".
[
NdW
: au jour d'aujourd'hui,
je n'ai toujours pas trouvé
confirmation ou infirmation
de ce fait. Toutefois, peut-être
s'agit-il d'une confusion avec
les évènements
qui suivent
].
En
effet, la Gendarmerie
française note dans son
rapport relatant les événements
de la nuit que :
"
Le 5 août
1944, vers une heure un bombardier
anglo-américain s'est
écrasé au sol
[
censuré par le Webmaster
] de la
commune de Glannes
[
censuré par le Webmaster
].
L'appareil
est entièrement détruit.
Des
militaires de l'armée
d'occupation interdisant l'accès
des débris de l'appareil
il n'a pas été
possible de constater si des
cadavres se trouvaient parmi
les débris.
Vers
4h3O un bombardier anglo-Saxon
a bombardé le passage
suérieur de la route
Nationale N° 34 et de la
ligne Paris-Strasbourg à
la sortie Ouest de Vitry-le-François
- 4 bombes ont éclaté
dans un pré à
50 mètres du pont. Une
dizaine de fils téléphoniques
longeant la voie ferrée
ont été coupés.
Pas
d'accident de personne
".
A
Glannes,
le
point de chute du Halifax
étant désormais sous contrôle
allemand, la population en a
été chassée
et semble n'avoir été
autorisée à s'approcher
des lieux du drame qu'au bout
de deux jours. Recueillis par
leur soin, les corps de 6 des
sept aviateurs et de 2 des trois
passagers sont portés
en terre au cimetière
communal de Huiron,
la localité de Glannes
sur le territoire de laquelle
a chuté le bomardier n'en possédant
pas.
Ainsi,
contrairement à ce que pense
alors les témoins de ce drame,
la totalité des occupants de
l'appareil n'a pas trouvé la
mort dans sa destruction. Deux
hommes sont parvenus à
se parachuter et échapperont
même à la capture
: le W/O
Hill dont l'odyssée
terrestre ne m'est pas connu
mais qui a peut-être été
recueilli par l'un des maquis
des environs regagnera la Grande-Bretagne
en octobre
1944, et l'agent Wagner
qui, pour sa part, est pris
en charge par le maquis de Blacy.
"
(…) Le
5 vers 13 heures, Chambon
descend au village et informe
M. Bontoux qu'il vient
de recueillir un parachutiste.
Ce dernier se dit chargé de
mission et veut voir le chef
d'arrondissement des FFI. M.
Chambon présente à M.
Cossu les papiers du
parachutiste. Ils comprennent
une carte d'identité en français
délivrée par la préfecture des
Bouches-du-Rhône avec cachet
et une carte d'alimentation,
le tout établi au nom de Cholet
Joseph.
M.
Cossu est chargé de se
rendre à la ferme pour vérifier
si l'on se trouve bien en présence
d'un ami. Cholet explique
que l'avion dans lequel il avait
pris place devait parachuter
des vivres. Il ignorait à quel
endroit exact ; était surpris
d'être près de Vitry alors qu'il
croyait survoler les Ardennes.
[ NdW
: la ville de Vitry-le-François
est implantée dans le
Sud-est du département de la
Marne, lui même au sud de celui
des Ardennes ].
Il
a pu sauter de l'appareil en
arrachant son gant droit, ce
qui lui a permis d'atteindre
son parachute et d'aider un
de ses camarades qui étaient
neuf. D'après lui, ce camarade
a dû sauter également, mais
personne ne l'a vu. [
NdW
: l'appareil emportait 10
personnes à son bord et non
pas 9 comme l'indique ce témoignage
] Cholet
veut retrouver son parachute
et sa musette contenant les
plis secrets dont il était chargé
; il doit se rendre dans les
Vosges.
Des
recherches sont immédiatement
effectuées et poursuivies le
lendemain avec l'aide de Robert
Fleuret de Huiron. Le
7, M. Cossu remonte aux
Perrières pour approvisionner
Cholet et apprend que
ce dernier qui, en compagnie
de Chambon et de Léon
Delaporte, a retrouvé
son parachute, est parti avec
M. Bontoux… ".
Poursuivant
sa mission, Joseph Wagner
survivra à la guerre pour rencontrer
son destin dans un accident
de la route en 1968.
Quant
à la destruction du Halifax
LL248/MAU,
on peut vraisemblablement la
porter au crédit de l'Oberleutnant
Ernst Drünkler, un pilote
de la 1./NJG
5 qui, en cette nuit
du vendredi 4
au samedi 5
août 1944 , revendique
un quadrimoteur à 01
h 04 (heure allemande)
dans le secteur BK-1
correspondant au point de chute
du bombardier.
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